Petite chronique d'été
Lors de la célébration des 110 ans du Salon, nous avons beaucoup parlé de sa fondatrice principale, Madame Jean Bach-Sisley, véritable femme de Lettres d'une grande importance en son temps et que nous avons évoquée :
http://poetisons.canalblog.com/archives/2012/11/05/25502801.html
http://poetisons.canalblog.com/archives/2012/11/30/25705908.html
Ces deux articles sont en lecture conseillée...Récemment, nous l'avons citée de nouveau au sujet d'un buste la représentant sculpté par sa grande amie Jeanne Bardey : http://poetisons.canalblog.com/archives/2016/02/28/33438069.html
Et bien Mme Bach-Sisley lui a dédié un des textes de son livre de poèmes en prose Vitres et Vitraux. Je suis en possession d'une édition originale de cet ouvrage, de plus dédicacé en 1927 par l'auteure à Marcel Rivière qui sera par la suite un grand Résistant et un grand Journaliste.
Ce poème en prose s'intitule : l'étang dans la carrière
"A mon amie, le grand sculpteur J.Bardey"
La mer est proche, mais on ne la voit pas ; on entend seulement sa claire confidence des jours de grand ciel limpide, et l'on perçoit l'odeur chaude de son repos.
La carrière abandonnée est un cirque allongé au fond duquel dort un large étang. Les assises rocheuses hautes et lisses tombent à pic dans l'eau si bleue qu'on dirait un immense saphir dans une monture fruste.
Pas une ride, pas un souffle sur la surface immobile.
Rouge, gris, vert, jaune, blanc ou pailleté de mica le rocher brûle sous le soleil, s'effrite meurt en menues parcelles dans l'onde recueillie, attentive et profonde.
Sur les cimes, les pins fument sous l'ardeur estivale, laissant couler leur sang âcre, éclater leurs fruits odorants ; l'âme des fleurs s'exaspère, l'arôme des cystes rôde et s'étire dans l'air embrasé, le grand soleil visite la carrière et plonge son dard au fond de l'étang solitaire. Comme un rayon d'amour au fond d'un oeil fasciné, il l'éclabousse d'or.
L'oeil, immense et bleu, est largement ouvert et ne voit rien, il est clair et ne reflète rien ; il ne connaît que le rayon qui le pénètre et la chaude odeur de la mer au repos.
Jean Bach-Sisley.